CHAPTER ONE ;
0 to14 «
Savannah sourit un peu, ne fais pas cette tête d'enterrement. » J'avais cinq ans, c'était à un gala en faveur des lamantins en voie de disparition dans l'océan atlantique … ou quelque chose d'aussi inutile. Mes parents se fichaient de la cause, je le comprenais même à cinq ans, mais l'important était d'être là, de se montrer soudé et d'exhiber son argent. «
C'est quoi un enterrement ? » Innocence quand tu nous tenais. «
Tu pourrais le découvrir rapidement si tu ne souris pas. » Oh merci pour la réponse. Elle me donna même un léger coup de coude en voyant arriver Madame Carlson et leur fils aussi haut que trois pommes. «
Bonjour Madame Carlson, quelle joie de vous voir ici. Je vous présente ma fille, Savannah. » Je pourrais presque jurer avoir reçu un autre coup de coude lorsqu'elle ajouta «
Allez dis bonjour ma chérie. » C'était la première fois qu'elle m'appelait « ma chérie », et je sentais que ce devait être un truc négatif. «
Bonjour. » finissais-je par articuler. Doucement.
[…]
«
Voilà, comme ça ça ira. » Ma mère finissait de coiffer mes cheveux. Enfin non. Elle observait la nourrice le faire. Face à un miroir, je grimaçai en voyant la robe affreuse choisie par ma mère et les espèces de couettes qu'elle avait également imposé. «
J'ai plus six ans maman. » Non, j'en avais quatorze. Et aucune envie de sortir dans cet accoutrement. Mais elle ignorait ma remarque et déposa sa main dans le haut de mon dos pour me pousser à bouger. Elle me guida jusque dans le salon, où, oh joie, la famille Carlson était présente. «
Qu'est-ce que tu attends, va saluer ton petit fiancé. » Je levais aussitôt la tête vers ma mère et si des éclairs avaient pu jaillir de mes yeux, elle serait décédée sur le champs. Non. Moi je n'aimais pas ce fils de bourge. Aucunement.
[…]
«
Dans quelques années on organisera un beau mariage pour vous deux. » «
Mais maman, je veux pas moi. » « [color=coral]Allons, fais pas ta gamine ma fille et va dormir. » Elle posait ses mains sur mes épaules pour me faire effectuer un demi-tour sur moi-même et me pousser à aller dans ma chambre. Mais non. «
Non, je veux pas. C'est pas lui que je veux. Je l'aime pas. Il est nul et il ... » «
Savannah ! » Elle m'avait coupé la parole et s'était levée pour montrer plus d'autorité sur moi. «
Tu feras ce qu'on te dit. » Et pour être sûre que je ne réponde rien, elle avait tourné les talons et m'avait laissée seule dans la cuisine. J'avais appris le lendemain mon inscription dans un pensionnat, loin de ma famille et loin de la gent masculine.
CHAPTER TWO ;
15 to 18«
Savannah Joy Kayla Cartwright ! » Oui, voici l'étendard complet de mes charmants prénoms. Peu de monde les connait tous d'ailleurs. Mais j'imagine qu'être directrice du pensionnat donnait tous les droits. «
Si vous continuez à vous comporter ainsi, vous allez finir par vous faire renvoyer ! » Oooh, trop dommage. J'affichais une moue déçue … mais je n'arrivais pas à être convaincante. «
Au prochain dérapage j'appelle vos parents ! » Je haussais les épaules et acquiesçais d'un signe de tête. Pour une bonne soeur directrice d'un pensionnat, elle était pas très futée. Vraiment pas. Je me levais de la chaise en face de son bureau et quittais cette pièce puante, un sourire aux lèvres. Sincèrement. Comment ne pouvait-elle pas imaginer que je faisais tout pour être renvoyée ? Je venais de passer trois ans dans cet enfer, c'était trop. Beaucoup trop. Du coup, depuis environ deux mois, j'avais peint la porte de l'Eglise, j'avais caché des bouteilles de vodka dans le confessionnal, j'avais lâché Crevard le lapin dans le potager histoire qu'on ait plus rien à vendre au marché le samedi, j'avais lâché la chaise roulante de Monsieur Jackson dans la pente qui menait au village, j'avais piétiné l'oreiller de notre pionne, ouvert les robinets avant de partir en randonnée, je n'avais surtout pas aidé à éponger l'eau en rentrant et j'avais surtout clairement embrassé mes camarades. Aux toilettes pour s'entraîner, puis pendant la messe du dimanche suivant. Alors bon … je me demandais simplement que faire de plus pour retourner à la maison … ?
[…]
«
Mais tu peux me dire ce qu'on va faire de toi ? » «
Des sushis. » «
Avec ton comportement tu ne seras jamais acceptée dans une autre école. » «
Avec des crevettes. » «
Et tu n'as pas l'air plus inquiète que ça ! » «
Non, j'ai faim. » C'était vrai. Je crevais de faim. Avec toutes mes conneries, j'avais été privée de la moitié des repas dans cette foutue prison pensionnat. «
Je peux aller au lycée au coin de la rue, ça ira très bien tu sais. » Ma mère se décomposait sur place. Une Cartwright dans la vie normale ? Du jamais vu. Mais je kiffais l'idée. D'ailleurs, j'avais pris le téléphone pour commander des sushis. Plein de sushis. Oh et une pizza aussi. La liberté était à portée de mes doigts. Enfin.
CHAPTER THREE ;
18 to 20«
Hey salut. » La fille en face de moi se retourna et me regarda bizarrement. «
On est ensemble en classe d'économie, je t'ai vue ce matin. » C'était normal qu'elle me regarde de la sorte. C'était mon premier jour de cour, je l'avais aperçue à l'autre bout de la classe. Elle ne m'avait sûrement même pas vue pour sa part. «
Je m'appelle Savannah et toi ? » Je tendais ma main, pour faire connaissance. Oui, c'était la première fois que j'étudiais dans une école publique, avec plein de gens et surtout des gens de tous les sexes, sans bonnes soeurs partout. J'étais aux anges, contrairement à mes parents qui n'avaient absolument pas eu le choix. C'était ça ou ... faire une croix sur un avenir professionnel fructueux. Ma mère avait bien pensé à faire venir un prof particulier à la maison mais … après l'avoir reçu en petite culotte, lui avoir fait croire que je me faisais battre à la maison, et m'être cachée pendant trois heures dans le grenier, ils avaient finit par céder à mon caprice. Ce serait l'école publique. «
Euh … appelle moi Robyn ça ira très bien. » Hésitante, elle finit par serrer la main que je tendais. Je me rendis alors compte que ce n'était peut-être pas obligatoire la poignée de main dans le monde normal.
[…]
«
Je peux m'asseoir là ? » Non je ne la suivais pas, quoique. Elle me répondit affirmativement de la tête. Je pris alors place en souriant. Elle avait été l'une des seules à ne pas me rejeter lorsque je lui avais parlé du mode de reproduction des baleines …
[…]
«
Tu viens à la fête ce soir ? » «
Carrément, compte sur moi. » Mes parents avaient bien entendu refuser. Mais je n'allais pas me contenter de leur désapprobation, ce serait mal me connaître. Cela faisait désormais deux ans que j'avais pris la liberté de mener ma vie. Je vivais chez mes parents, mais je mettais un point d'honneur à ne pas les écouter. Il me disait blanc, je faisais noir, tout simplement. Robyn ne s'étonnait donc plus de m'attendre en bas de ma fenêtre, derrière la maison avant de sortir. J'aurais d'ailleurs pu sérieusement considérer de me lancer dans une carrière de cascadeuse. Cascadeuse sexy. Je descendais en sous-vêtements, avant d'enfiler ma robe du soir sur le gazon parfaitement tondu.
[…]
«
Savannah ! » «
Mmh ... » J'ouvrais à peine un oeil, opération trop compliquée pour moi. J'avais l'impression qu'un quinze tonnes roulait sur ma tête. Quel salaud. «
SAVANNAH JOY KAYLA ! » Une porte claquait après l'interjection de ma mère. Une interjection pas vraiment amicale. Je faisais alors un effort pour ouvrir mes deux yeux et je me redressais légèrement dans mon lit. Je devinais ma mère, debout devant mon lit, l'air furax. Très furax. «
Tu … tu … tu peux me dire ce que c'est que … ça ? » Elle pointait du doigt un truc à côté de moi. Les sourcils relevés, totalement dans l'incompréhension et une main sur mon front, je tournai le regard pour suivre le doigt de ma mère. Je m'attendais à voir un porc épic ou un dinosaure, mais non. C'était Robyn. «
Ca … c'est une fille maman. T'en as jamais vu ? » Robyn était également réveillée et avait l'air tout aussi beurrée que moi. La soirée avait été bonne. Très bonne. L'alcool avait légèrement trop coulé. «
Qu'est-ce que … pourquoi elle est là ? » «
C'est plus facile pour coucher ensemble d'être dans le même lit tu sais. » J'affichais un sourire alors que Robyn me donnait un coup de pied dans mes tibias, l'air désapprobateur. Oui je mentais, et alors ? Suite aux cris stridents de ma mère, mon père débarqua à son tour. Oh joie. «
Ne me dis pas que … que ... » «
Oui on sors ensemble, et je l'aime. » J'embrassais alors Robyn sous les yeux outrés de mes parents. Oh rien de tout ça n'étais vrai. Mais j'adorais emmerder mes vieux. Et au fait … Robyn embrassait bien. Intéressant comme découverte. Bref. Mes parents avaient fuis, nous laissant morte de rire. «
T'es con Savannah Joy Kayla, tu veux tuer tes parents ? » «
Comment t'as pu retenir ça alors que t'es bourrée ? » Je lui donnais un coup de coussin alors qu'elle avait appris une chose de plus sur moi. La seule chose qu'elle ignorait peut-être.
CHAPTER FOUR ;
«
Mais attends, oui t'étais bizarre comme fille. On se connaissait depuis dix minutes que tu m'as dis qu'une baleine pouvait éjaculer jusqu'à 1800 litres de sperme ! » «
Mais c'était capital comme information ! Je venais de découvrir ça et … j'en revenais pas quoi. » J'essayais de me défendre mais c'était peine perdue. Jusqu'à mes dix-huit ans je n'avais pas connu la vie. Alors j'avais foiré. Enfin à moitié. Robyn avait dû me prendre pour une folle furieuse, mais elle ne m'avait pas rejetée. Non. D'ailleurs, on était encore là, huit ans plus tard à rire de cette scène, confortablement installées dans notre canapé. Qui pouvait croire qu'une histoire de baleine allait me faire rencontrer ma meilleure amie ?